(Sans accents)


 

BALLADE EN JARGON  I

A Parouart  le grant mathegaudie
Ou accolez sont duppez et noirciz 
Et par les anges suivans la paillardie
Sont greffiz et prins cinq ou six 
La sont bleffleurs au plus hault bout assis 
Pour le eviage et bien hault mis au vent
Escheques moy tost ces coffres massis 
Car vendengeurs des ances circoncis 
S'en brouent du tout a neant
  Eschec eschec pour le fardis. 

Broues moy sur ces gours passans
Advises moy bien tost le blanc
Et pictonnes au large sus les champs
Qu'au mariage ne soiez sur le banc
Plus qu'un sac n'est de plastre blanc 
Si gruppes estes des carieux
Rebignes moy tost ces enterveux 
Et leur monstres destrois le bris 
Qu'enclaves ne soies deux et deux 
  Eschec eschec pour le fardis. 

Plantes aux hurmes vos picons 
De paour des bisans si tres durs
Et aussi d'estre sur les joncs
Enmahes en coffres en gros murs 
Escharices ne soies point durs
Que le grand Can ne vous face essorez 
Songears ne soies pour dorez
Et babignes tousjours aux ys
Des sires pour les desbouses
  Eschec, eschec pour le fardis.

Prince froart  des arques petis 
L'un des sires si ne soit endormis
Luez au bec que ne soies greffiz
Et que vos emps n'en aient du pis 
  Eschec, eschec pour le fardis.


BALLADE EN JARGON  II

Coquillars en aruans a ruel 
Men ys vous chante que gardes 
Que n'y laissez et corps et pel 
Qu'on fist de Collin l'escailler
Devant la roe babiller
Il babigna pour son salut 
Pas ne scavoit oingnons peller
Dont l'amboureux luy rompt le suc.

Changes voz andosses souvent
Et tires tout droit au temple 
Et eschiques tost en brouant
Qu'en la jarte ne soiez emple 
Montigny y fut par exemple
Bien ataches au halle grup
Et y jargonnast il le tremple 
Dont l'ambourex luy rompt le suc. 

Gailleurs bien faitz en piperie 
Pour ruer les ninars au loing 
A l'asault tost sans suerie 
Que les mignons ne soient au gaing
Farciz d'un plumbis a coing 
Qui griffe au gard le duc 
Et de la dure si tres loing 
Dont l'ambourex luy rompt le suc. 

Prince, arriere du ruel 
Et n'eussies vous denier ne pluc
Qu'au giffle ne laissez l'appel 
Pour l'ambourex qui rompt le suc. 


BALLADE EN JARGON  III

Spelicans 
Qui en tous temps 
Avances dedans le pogoiz
Gourde piarde 
Et sur la tarde 
Desbousez les pouvres nyais 
Et pour soustenir voz pois
Les duppes sont prives de caire 
Sans faire haire
Ne hault braire 
Metz plantez ilz sont comme joncz 
Par les sires qui sont si longs.

Souvent aux arques
A leur marques
Se laissent tous desbouses
Pour ruer 
Et enterver 
Pour leur contre que lors faisons 
La fee les arques vous respons
Et rue deux coups ou trois
Aux gallois 
Deux ou trois 
Nineront trestout au frontz 
Pour les sires qui sont si longs. 

Et pour ce bevardz
Coquillars
Rebecquez vous de la montjoye 
Qui desvoye 
Vostre proye
Et vous fera du tout brouer 
Par joncher 
Et enterver 
Qui est aux pigons bien chair 
Pour rifler 
Et placquer 
Les angelz de mal tous rons 
Pour les sires qui sont si longs. 

De paour des hurmes 
Et des grumes 
Rasurez voz en droguerie
Et faierie
Et ne soiez plus sur les joncs
Pour les sires qui sont si longs. 


BALLADE EN JARGON  IV

Saupicquez frouans des gours arquez 
Pour desbouses beaus sires Dieux
Alles ailleurs planter voz marques
Bevards vous estes rouges gueux 
Berart s'en va chez les joncheurs 
Et babigne qu'il a plongis
Mes freres ne soiez embraieux 
Et gardez les coffres massis. 

Si gruppes estes des grappez
De ces angelz si graveliffes
Incontinant mantheaulx et chappes 
Pour l'emboue ferez eclipses
De vos farges feres besifles
Tout debout nompas assis
Pour ce gardes d'estre griffez
En ces gros coffres massis. 

Niaiz qui seront attrappez
Bien tost s'en brouent au halle 
Plus n'y vault que tost ne happes 
La baudrouse de quatre talle
Destires fait la hirenalle
Quant le gosier est assegis 
Et si hurcque la pirenalle
Au saillir des coffres massis.

Prince des gayeuls les sarpes 
Que vos contres ne soient greffiz 
Pour doubte de frouer aux arques
Gardes vous des coffres massis. 


BALLADE EN JARGON  V

Joncheurs jonchans en joncherie 
Rebignez bien ou joncherez
Qu'Ostac n'embroue vostre arerie
Ou accoles sont voz ainsnez 
Poussez de la quille et brouez
Car tost seriez rouppieux 
Eschec qu'accolez ne soies
  Par la poe du marieux.

Bendez vous contre la faerie
Quant vous auront desbouses 
N'estant a juc la rifflerie 
Des angelz et leurs assoses 
Berard si vous puist renversez
Si greffir laisses vos carrieux 
La dure bien tost ne verres 
  Par la poe du marieux.

Entervez a la floterie
Chanter leur trois sans point songer
Qu'en astes ne soies en surie 
Blanchir vos cuirs et essurgez
Bignes la mathe sans targer 
Que voz ans n'en soient ruppieux
Plantes ailleurs contre assegier
  Par la poe du marieux.

Prince bevardz en esterie 
Querez couplaus pour ramboureux 
Et autour de vos ys luezie
  Par la poe du marieux.


BALLADE EN JARGON VI

Contres de la gaudisserie 
Entervez tousjours blanc pour bis 
Et frappes en la hurterie 
Sur les beaulx sires bas assis
Ruez des fueilles cinq ou six 
Et vous gardes bien de la roe 
Qui aux sires plante du gris
Et leur faisant faire la moe. 

La giffle gardes de rurie 
Que voz corps n'en aient du pis 
Et que point a la turterie
En la hurme ne soies assis
Prens du blanc laisse du bis
Ruez par les fondes la poe
Car le bizac avoir advis
Fait aux beroars faire la moe.

Plantez de la movargie
Puis ca puis la pour l'urtis
Et n'espargne point la flogie 
Des doulx dieux sue les patis 
Voz ens soient assez hardis 
Pour leur advancer la droe
Mais soient memoradis 
Qu'on ne vous face faire la moe.

Prince qui n'a bauderie 
Pour eschever de la soe 
Danger de grup en arderie 
Fait aux sires faire la moe.


BALLADE EN JARGON  VII   (S.I) 

En Parouart, la grant matte gaudye
Ou accolez sont caulx et agarciz
Nopce ce sont, c'est belle melodie: 
La sont beffleurs au plus hault bout assis, 
Et vendengeurs, des ances circoncis 
Comme servis, sur ce jonc gracieux, 
D'ance plaisant et mes delicieux. 
Car Coquillart n'y remaint grant espace 
Que, vueille ou non, ne soit fait des sieurs; 
Mais le pis est mariage - M'en passe !

Reboursez tous, quoy que l'en vous en dye,
Car on aura beaucoup de vous mercys.
Ronde n'y vault ne plus qu'en Lombardie.
Eschec, eschec pour ces coffres massis !
De gros barreaulx de fer sont les chassis.
Poste a Gautier e serez un peu mieulx.
Plantez picons sur ces beaulx sires dieulx; 
Luez au bec que roastre ne passe, 
Et m'abatez de ces grains neufz et vieulx.
Mais le pis est mariage - M'en passe !

Que faites-vous ? Toute menestrandie
Antonnez poiz et marques six a six
Et les plantez au bien en paillardie: 
Sur la sorne que sires rassis,
Sornilles moy ces georgetz si farciz, 
Puis eschequez sur gours passants tous neufz. 
De seyme oyez, soiez beaucoup breneulx. 
Plantez vos hiscz jusques elle reppasse,
Car qui est grup il est tout roupieulx, 
Mais le pis est mariage - M'en passe !

Prince planteur, dire verte vous veult: 
Mais Coquillart, pour les dessuditz veult 
Avant ses jours piteusement trespasse,
Et a la fin en tire ses cheveulx. 
Mais le pis est mariage - M'en passe !


BALLADE EN JARGON  VIII  (S.II)           

Vous qui tenez vos terres et vos fiefz
Du gentil roy, Davyot appele, 
Brouez au large et vous esquarrissez
Et gourdement aiguisez le pelle 
[Loing de la roue ou Bernard est alle]
pour les esclos qui en peuvent issir, 
Voyez ce jonc ou l'en fait maint souppir: 
Mines taillez et chaussez vos besicles, 
Car en aguect sont, pour vous engloutir,
Anges bossus, rouastres et scaricles. 

Coqueurs de pain et pommeurs affectez,
Gaigneurs aussi, vendengeurs de coste,
Belistriens perpetuels des piez.
Qui sur la voue avez lardons clamez 
En jobelin ou vous avez este
Par le terrant pour le franc ront querir
Et [qui] aussi pour la marque fournir 
Avez tendu au pain et aux menicles, 
Pour tant se font adoubter et cremir
Anges bossus, rouastres et scaricles. 

Rouges goujons, fargets embabillez, 
Gueux gourgourans par qui gueux sont gourez,
Quant a brouart sur la sorne abrouez, 
Levez les sons et si tastez lesquelz, 
Qu'il n'y ait anges desclaus empavez
En la vergne ou vostre han veut loirrir,
Car des sieurs pourriez bien devenir
Se vous estiez happez en telz bouticles:
Pour tant se font ataster et cremir 
Anges bossus, rouastres et scaricles. 

Prince, planteurs et bailleurs de saffirs 
Qui sur les dois font la perle blandir, 
Belistriens, porteurs de vironicles,
Sur toutes riens doivent tel gens cremir
Anges bossus, rouastres et scaricles. 


BALLADE EN JARGON  IX  (S.III) 

Un gier coys de la vergne Cygault,
Lue l'autryer en brouant a la Loirre, 
Ou gierement on macquilloit riffault; 
Et tot a cop veis jouer de l'escoirre 
Ung maquonceau a tout deux gruppelins,
Brouant au bay, a tout deux walequins,
Pour avancer au solliceur de pye. 
Gaultier lua la gauldrouse gaudye,
Et le marquin, qui se polye ey coinsse, 
Babille en gier en pyant a la sye,
Pour les duppes faire brouer au mynsse. 

Apres moller lue ung gueux qui voult
Pour mieux hyer desriver la touloire, 
C'est pour livrer aux arques ung assault
De missemont maquilles a l'esquerre.
Puis dist ung gueulx :ÇJ'ai paulme deux florins. È
L'autre pollist marquins et dollequins  
Et la marque souvent le gain choisit. 
Adraguangier puis dist, le mieulx fourny, 
ÇPicquons au veau, saint Jacques, je m'espince.
Eschequer fault quant la pye est juchie 
Pour les duppes faire brouer au mynsse. È

Puis dist ung gueulx qui pourluoit en hault:
ÇJ'ai paulme tout le gain de ma choirre, 
Et m'a joue la marque du giffault 
J'en suis mieult prins que vollant a la foire 
Elle est brouee envers ses arlouys; 
C'est tout son fait que d'engandrer les gains 
A hornangier, ains qu'elle soit lubie.
De la hanter ma fueille est desgaudie;
Quant de gain n'ay plus vaillant une saince 
Mais tous jours est gourdement entrongnie 
Pour les duppes faire brouer au mynsse. È

Prince gallant, quant vous sauldrez la hye, 
Luez la grime s'elle est desmaquillie 
Et retrallez se le bizouart saince
Qu'elle ne soit de l'assault de turquie,
Pour les duppes faire brouer au mynsse. 


BALLADE EN JARGON  X   (S.IV) 

Brouez, benards, eschequez a la saulve, 
Car escornez vous estez a la roue.
Fourbe, joncheur,chacun de vous se saulve,
Eschec, eschec,coquille si s'embroue !
Cornette court, nul planteur ne s'il joue ! 
Qui est en plant, en ce coffre joyeulx, 
Pour ces raisons il a, ains qu'il s'escroue,
Jonc verdoiant, haure du marieux. 

Maint coquillart, escorne de sa sauve 
Et desbouse de son ence ou poue,
Beau de bourdes, de blandy de langue fauve, 
Quide au rond faire aux grimes la moue, 
Pourquarre bien affin qu'on ne le noe.
Couplez vous trois a ces beaulx sires dieux,
Ou vous aurez le ruffle en la joue
Jonc verdoiant, haure du marieux. 

Qui stat plain en gaudie ne se mauve. 
Luez au bec que l'en ne vous enclous !
C'est mon advis tout conseil sauve
car quoy aucun de l'assault ne se loue: 
La fin est telle que de l'oue,
Car qui est au grup il a mais c'est au mieulx 
par la vergne tout au long de la voue 
Jonc verdoiant, haure du marieux. 

Vive David ! saint archquin la baboue ! 
Jehan mon amy, qui les feuilles desnoue ! 
Le vendangeur, beffeur comme une choue, 
Loing de son plain, de ses flos curieulx. 
Noe beaucoup,dont il recoit fressoue, 
Jonc verdoiant, haure du marieux. 


BALLADE EN JARGON XI   (S.V ) 

De devers quay par un temps d'ivernois
Veiz abrouer a la vergne cygault
Marquez de plant, dames et andinas
Et puis merchants, tous telz qu'au mestier fault
........................................
Gueulx affinez, allegrins et floars,
Mareus, arves, pimpres, dorelotz et fars, 
Qui par usaige a la vergne jolye
Abrouerent au flot de toutes pars 
Pour maintenir la joyeuse folye.

Pour mieux abbatre et oster le broullart
Adraguerent de Grenoble maint crupault
De rumatin et puis molt sives gras; 
Crouge marir sans avancer ravault,
........................................
Babillangier sur tous fais et sur ars 
Tant qu'il n'y eust de l'arton sur les cas, 
Brocquans, dorelots, grain, guain, aubeflorye,
Que tout ne fust desploye [et] en pars, 
Pour maintenir la joyeuse folye.

Pour mieulx polir et desbouser
On polua des luans bas et hault 
Tant qu'il n'y eust de vivres en caras; 
Puis feist on faire a saint arquin un saut. 
Apres, doubtant de anges l'assault, 
On verroulla et serra les busars
Pour mieux blanchir et desbouser coquars. 
La ot un gueulx son endosse polye,
Qui puis alla emprunter aux lombars 
Pour maintenir la joyeuse folye.



Ouvrages ˆ consulter :


[ˆ Texte de Villon]

Ballades en jargon (une traduction japonaise)